jeudi 13 janvier 2011

La première résolution

S’il y a bien une résolution que je souhaiterais prendre, c’est celle de devenir une fille qui boit du thé le matin.
Vous voyez certainement de quel genre de fille je veux parler. On en connait tous, au moins une, mais de loin, mes amies, moi-même, heureusement pour mon égo, n’en sommes pas, ou alors on me le cache.


La fille qui boit du thé le matin, pardon, il convient de dire la fille qui boit son thé le matin, n’a définitivement pas le même début de journée que le mien.
Elle, son réveil sonne avec un petit bruit d’oiseaux qui ne me ferait même pas me retourner. Elle ouvre immédiatement les yeux, de jolis yeux non fripés, pas gonflés, clairs de préférence.
Elle s’étire tel un chat Burmese, comme il est expliqué dans Cosmo, puis elle replie délicatement ses draps de lin qui de toute façon n’ont pas fait un pli, et descend avec grâce  de son lit.
Elle porte le même déshabillé que la fille Obao des années 90, les (vieux) messieurs s’en souviennent, ce déshabillé qui volète derrière elle.
Elle est coiffée comme une mariée moderne et chic d’un chignon si simple qui tient avec deux baguettes (rapport au thé sans doute), et elle, elle marche nus pieds, sans avoir froid, sans se cogner un orteil, vers une cuisine illuminée de soleil, au son d’une musique aussi douce que semblent être sa peau, son caractère, son tempérament, sa vie, son avenir.
Et là elle prépare son thé.
Parce que oui, la fille qui boit du thé le matin, elle a son thé. Pas un truc en sachet, pas des graines sombres qu’il faut sortir d’une boite en métal qu’on a tous gardé au moins une fois au cas où (ne me dites pas que je suis, en plus, la seule à conserver ses boites, au cas où).
Elle, elle a des feuilles délicatement roulées, emballées dans de la gaze très fine avec un ruban de couleur, aux pigments naturels qui ne déteignent pas dans le thé.
 Son thé, donc, bien choisi, un thé rare d’un endroit précis du japon, sur les coteaux d’un village reculé avec dedans tous les antis oxydants de la planète, les flavonoïdes capables d'absorber et de désactiver les radicaux libres susceptibles d'être néfastes, ainsi que les catéchines qui en plus sentent le début de la floraison des cerisiers.
Son thé donc.
Au moins, c’est peut être pour ça qu’elle est célibataire la fille qui boit son thé le matin, quel garçon a envie de traverser toute une ville pour acheter le sachet de thé ? Si si, elle est célibataire.

Je ne vous parle pas du matériel, propre, rangé, dans des tons pastel, et de la fameuse boule qui est brillante tant elle semble neuve, alors que dans mienne toute rouillée, il reste toujours des vieux trucs noirs collés et que la chainette est cassée, à raz de la dite boule.

Alors j’abrège, je passe sur la température idéale de l’eau, sur le fait qu’elle ne se brule pas lorsqu’elle déguste sa première gorgée, tenant de ses deux mains manucurées discrètement une tasse fumante, sur les muffins dorés qui sautent directement sur la petite assiette prévue, sur la serviette brodée par son arrière grand-mère, le téléphone qui ne sonne pas, et qu’à aucun moment elle ne regarde la pendule, elle a le temps, elle. Son bain, je n’en doute pas, sera prêt quand le thé sera avalé.

Voilà, c’est ça que je veux être, la fille qui boit son thé le matin.

Moi, mon radio réveil fait en moyenne 5 tentatives en hurlant les mauvaises infos du jour, avant que je ne n’accepte de faire un roulé boulé hors du lit sur lequel je laisse un tas de couette, oreillers et quelques livres.
Moi j’enfile ce qui me tombe sous la main, parfois je l’avoue un short et un sweat qui sentent l’adolescent (mais ce sont les miens d’adolescents, ça sent moins mauvais).
Moi, comme une fille normale, je vais d’abord aux toilettes, la capacité vésicale féminine étant moindre que la masculine, je le certifie, ayant  touché nombre de vessies lors de césariennes, urgentes ou non.
Moi, ensuite, je renverse tout, les grains de café, de l’eau à côté de la machine, et la première personne qui oserait m’adresser la parole avant les premiers effets du café sur mon cerveau embrumé, avant que les connexions, parole, caractère, gentillesse, réveil soient établies. (Quinze minutes, scientifiquement prouvé).
Je connais quelqu’un qui prépare son café la veille, je ne sais pas pourquoi je trouve ça pathétique, je ne veux pas faire ça, là est la limite de ma maniaquerie, il en fallait une.
Moi je n’ai pas de tasse fétiche, si j’en ai une propre déjà je frôle l’extase.  Si elle sort du lave vaisselle sans céréales encore collées dans le bol parce que la phrase : « rince ton bol avant de le mettre au lave vaisselle » est une des phrases les plus difficiles à assimiler avant l’âge de 25 ans, chez les garçons du moins, les miens en tous cas, là je deviens croyante (en Dieu, aux fées, aux elfes, ou à la visite d’une femme de ménage pendant la nuit).
Moi bien sur je suis en retard et bien sur je fais bruler mes toasts une fois sur deux, or j’en prends deux.

Alors oui, je voudrais tellement devenir une fille qui boit son thé le matin…
Si seulement je n’aimais pas tant le café…

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